Un nouveau rapport pour aider à lutter contre la criminalité financière liée au trafic d'espèces sauvages en Europe

Un nouveau rapport pour aider à lutter contre la criminalité financière liée au trafic d'espèces sauvages en Europe

Bruxelles, 12 juin 2023 - TRAFFIC et WWF lancent le rapport "Wildlife Money Trails " pour aider les autorités chargées de l'application de la loi et les institutions financières à mettre à jour les crimes financiers liés au trafic d'espèces sauvages et de bois dans l'UE. Le rapport présente 16 études de cas dont deux en Belgique, représentant 18 millions d'euros de profits illicites.

Une utilisation insuffisante des investigations financières dans le cadre du trafic d'espèces sauvages peut conduire à une activité illégale croissante 

Le trafic d'espèces sauvages et de bois implique souvent des réseaux transnationaux de criminalité organisée et génère des revenus illicites considérables, qui se chiffrent en milliards chaque année. Malgré la gravité de cette activité criminelle, les enquêtes financières et les méthodes de recouvrement d'avoirs qui s'y rapportent restent largement insuffisantes.
Malgré la gravité de cette activité criminelle, les enquêtes financières et les méthodes de recouvrement des actifs restent largement sous-utilisées dans l'UE, les enquêtes et les poursuites relatives au trafic d'espèces sauvages reposant toujours principalement sur des accusations de braconnage ou de trafic. Les trafiquants d'espèces sauvages ne sont donc pas punis pour les délits financiers qu'ils ont commis, et leurs avoirs criminels restent entre leurs mains, ce qui leur permet de continuer à investir dans leurs activités illégales.
 
"La plupart des trafiquant·es d'espèces sauvages cherchent avant tout à gagner de l'argent. C'est le profit qui les motive, les aide à  maintenir et à  développer leur business. Nous ne pourrons pas gagner la lutte contre le trafic d'espèces sauvages si nous ne nous attaquons pas à ce qui est au cœur de la motivation des trafiquant·es", déclare Emilie Van der Henst, Senior Manager Wildlife Trafficking à TRAFFIC et WWF.

L'approche qui consiste à "suivre l’argent" permet non seulement d'identifier les criminel·les de haut niveau au sein d'un réseau, mais aussi d'estimer le montant de l'argent généré par l'activité criminelle, ce qui peut servir de base à la récupération des avoirs. La saisie des actifs des criminel·les est essentielle pour affaiblir ce trafic lucratif  et empêcher l'expansion de cette activité.


 
Le manque de connaissances des institutions financières conduit à des transactions financières suspectes qui passent inaperçues
 
Le rapport Wildlife Money Trails montre comment les institutions financières telles que les banques peuvent être utilisées par les trafiquants et être exposées au blanchiment d'argent, à la fraude et à la facilitation de la criminalité organisée.
 
Les directives européennes existantes en matière de lutte contre le blanchiment d'argent imposent aux institutions financières de vérifier l'identité d'un client, de mettre en place des contrôles basés sur les risques et de surveiller les transactions afin de détecter tout comportement inhabituel ou suspect ou toute anomalie susceptible d'indiquer un blanchiment d'argent. En cas de comportement suspect, les banques ont l'obligation de transmettre des rapports sur les transactions suspectes à la cellule de renseignement financier (CRF) de l'organisme national compétent chargé de l'application de la loi. À notre connaissance, très peu de rapports de transactions suspectes sont transmis aux CRF en rapport avec le trafic d'espèces sauvages.
 
"Il semble que le trafic d'espèces sauvages ne soit pas encore bien connu de la plupart des banques en Europe ; elles disposent de peu d'informations sur la manière dont elles peuvent être exposées à cette activité criminelle, et celle-ci est souvent considérée comme peu prioritaire. Nous espérons que ce rapport aidera le secteur financier et guidera les autorités européennes chargées de l'application de la loi dans les enquêtes visant à 'suivre l'argent'", a conclu Emilie Van der Henst.
 
Le rapport comprend 16 études de cas, dont 13 incluent des estimations de la valeur du trafic; la valeur combinée  s'éleve à 18 millions d'euros. Les études de cas proviennent des autorités chargées de l'application de la loi en Belgique, en Hongrie, aux Pays-Bas, au Portugal, en Slovaquie, en Espagne et en Suède, ainsi que d'Europol, et concernent un large éventail d'espèces de bois, d'oiseaux, de reptiles, d'araignées, de mammifères et de poissons. Les études de cas illustrent certaines approches pratiques de l'application des principes de "suivre l’argent" par les enquêteurs des services répressifs.


 
Trafic de meubles en bois de rose indien vers la Belgique
 
La Belgique est l'un des pays qui a fourni des études de cas intégrant des principes d’enquêtes financières parallèlement aux enquêtes sur la criminalité environnementale. L'une des affaires a été ouverte à la suite de la saisie, en octobre 2020 à Anvers, de meubles fabriqués en bois de rose indien Dalbergia sissoo, une espèce protégée par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Les meubles ont été importés d'Inde par une société belge d'ameublement, sans permis CITES valable, en prétendant à tord que les meubles importés étaient fabriqués à partir d'espèces non protégées par la CITES. En appliquant les principes de l'enquête financière, tels que l'examen des registres de l'entreprise et des registres d'importation connexes, les enquêteurs du service d'inspection de la CITES ont pu estimer qu'entre janvier 2017 et novembre 2020, des meubles illégaux d'une valeur estimée à plus de 3 millions d'euros ont été importés en Belgique. L'enquête a permis de mettre au jour un réseau de plusieurs entreprises qui ont facilité le trafic de bois. Des accusations criminelles ont été présentées à la Cour en février 2023, et les poursuites sont toujours en cours.
 
Dans le plan d'action de l'UE contre le trafic d'espèces sauvages lancé en novembre 2022, la Commission européenne appelle à lancer systématiquement des enquêtes financières dans le cadre des enquêtes sur la criminalité organisée et des procédures de recouvrement d'actifs. Le projet UNITE financé par l'UE, qui a produit le rapport Wildlife Money Trails, vise à encourager les organismes d'application de la loi à utiliser davantage les enquêtes financières dans le cadre du trafic d'espèces sauvages et de bois, en vue de saisir les actifs criminels et de générer des condamnations pour crime financier. Il vise également à inciter les dirigeant·es des institutions financières basées en Europe à examiner les risques de blanchiment d'argent liés au trafic d'espèces sauvages.


Clause de non-responsabilité

Le rapport a été financé par le Fonds de sécurité intérieure de l'Union européenne — Police. Le contenu de ce communiqué de presse représente uniquement le point de vue des auteurs et relève de sa seule responsabilité. La Commission européenne décline toute responsabilité quant à l'utilisation qui pourrait être faite des informations qu'il contient.

Consulter le rapport Wildlife Money Trails

Contact

Emilie Van der Henst, EU Wildlife Cybercrime Project Manager 
[email protected] 
+32 4 85 33 27 59 

A propos du WWF (World Wide Fund for Nature) :

Depuis 60 ans, le WWF est l’une des principales organisations indépendantes de préservation de la nature et l’une des plus expérimentées. Il compte plus de cinq millions de membres, donateurs et donatrices, au sein d’un réseau mondial actif dans plus de 100 pays. Le WWF coopère avec d’autres acteurs et actrices pour mettre fin à la dégradation des milieux naturels sur la planète et œuvrer à un avenir où les humains vivront en harmonie avec la nature, par la conservation de la diversité biologique, la promotion d’une utilisation durable des ressources naturelles et la lutte contre la pollution et le gaspillage. Les 10 prochaines années seront cruciales pour aborder les principales menaces qui pèsent sur la nature et sur l’humanité.

A propos de TRAFFIC:

TRAFFIC est une organisation non gouvernementale de premier plan qui travaille à l'échelle mondiale sur le commerce des espèces sauvages dans le contexte de la conservation de la biodiversité et du développement durable, avec pour mission de veiller à ce que le commerce des espèces sauvages ne menace pas la conservation. Pour en savoir plus, consultez le site www.traffic.org.