82 % des Belges veulent plus de restauration de la nature mais nos politicien·nes tentent de faire échouer la loi européenne sur la restauration de la nature
82 % des Belges veulent plus de restauration de la nature mais nos politicien·nes tentent de faire échouer la loi européenne sur la restauration de la nature
Lundi 18 mars 2024, Bruxelles - Si le monde entier consommait comme les Belges, les ressources naturelles de la planète seraient épuisées dès le samedi 23 mars. C'est à cette date que tombe le « Jour du Dépassement » en Belgique. Earth Hour est également organisée dans le monde entier ce jour-là, un triste symbole qui nous rappelle que les limites de notre planète ne sont pas extensibles. Au niveau européen, il existe bien un plan pour donner de l’espace à la nature et à ses précieuses ressources : la loi sur la restauration de la nature. Un sondage réalisé par iVox pour le WWF-Belgique montre que 82% des Belges se disent en faveur de davantage de restauration de la nature. Pourtant, l’existence de cette loi est actuellement menacée, en dépit de l’opinion publique : alors que cette loi européenne semblait avoir été validée il y a quinze jours, les partis flamands Open Vld, N-VA et CD&V continuent de vouloir la faire échouer.
À partir du 23 mars 2024, notre pays aura épuisé son crédit de ressources naturelles que la Terre est capable de régénérer en un an. Nous aurions besoin de 4,1 Terres si tout le monde vivait comme les Belges. Nous n’avons bien évidemment pas ces trois planètes supplémentaires. Heureusement, le Green Deal européen propose un plan de sauvegarde de la nature et de ses ressources, et le projet de loi européenne sur la restauration de la nature est une mesure clé de ce plan.
Depuis sa première proposition par la Commission européenne en juin 2022, ce projet de loi a fait l'objet d'une campagne de désinformation sans précédent de la part des politicien·nes conservateurs et conservatrices, et d'un débat incroyablement polarisé. Jamais la nature n'a été autant politisée et la science mise à mal. Pourtant, cette loi est parvenue à franchir presque toutes les étapes du processus législatif européen. En novembre 2023, les États membres, la Commission européenne et le Parlement européen sont parvenus à un compromis qui répond, entre autres, aux demandes flamandes de prendre en compte les caractéristiques régionales et les zones densément peuplées, et ce texte a été approuvé par le Parlement européen le 27 février.
Obstacles et manoeuvres
Il ne reste plus qu’à obtenir l'approbation officielle des États membres : il s'agit normalement d'une formalité puisque les Etats membres avaient déjà donné leur feu vert en novembre 2023, mais certains décideurs et décideuses belges ne sont pas de cet avis... Lors des manifestations agricoles, le gouvernement flamand (composé de la N-VA, de l'Open VLD et du CD&V) a mentionné dans son accord agricole qu'il continuerait à s'opposer à la loi sur la restauration de la nature et à appeler les autres gouvernements en Belgique et dans l'UE à mettre la loi « sur pause ». Comme plus de 30 organisations l’ont déjà souligné, les problèmes fondamentaux du monde agricole ne disparaîtront pas avec l'assouplissement des règles environnementales. La ministre flamande de l'environnement, Zuhal Demir, a pourtant même adressé une lettre au Premier ministre De Croo, moins d'une semaine avant le vote au Parlement européen, pour demander que la loi sur la restauration de la nature ne soit plus inscrite à l'ordre du jour de l'Union européenne. Plus encore, elle lui demande de convaincre la Commission européenne de retirer purement et simplement le projet de loi.
Peu après l'approbation du Parlement européen, le président de l'Open-VLD, Tom Ongena, a annoncé son intention de rechercher un nombre suffisant d'États membres pour bloquer la loi sur la restauration de la nature. Ce type de combines est sans précédent et inédit de la part du pays qui assure la présidence du Conseil de l'Union européenne. Le pays qui assure la présidence est censé agir en tant que facilitateur et intermédiaire intègre et neutre, en s'élevant au-dessus de ses propres intérêts nationaux. La présidence doit notamment faire avancer l'agenda de l'UE, élaborer une bonne législation et promouvoir la coopération entre les États membres. Le parti de notre Premier ministre et d'autres partis au gouvernement flamand ne parviennent donc pas à s’acquitter de ces tâches avec intégrité, ce qui ne donne pas une bonne image de la présidence belge.
Les Belges veulent plus de restauration de la nature
Le WWF-Belgique a réalisé un sondage avec iVox entre le 14 et le 19 février 2024 (soit au moment où l'actualité était dominée par les manifestations agricoles), afin de mesurer l'attitude des Belges à l'égard de la nature, des politiques liées à la nature et plus particulièrement de la loi sur la restauration de la nature. Il en ressort que 82% des Belges sont résolument en faveur de plus de restauration de la nature, et ce quelle que soit leur place sur l'échiquier politique. 90% des Belges pensent que la nature est importante et apprécient les avantages qu'elle apporte à notre société, en particulier les avantages pour notre santé (78%), les services écosystémiques que la nature remplit (70%) et les possibilités de repos et de loisirs (66%).
Les questions portant sur les principes de la loi sur la restauration de la nature sont encore plus parlantes : plus de 84% des répondant·es pensent que nos gouvernements devraient intensifier leurs efforts pour restaurer au moins 30% de la nature terrestre et marine en mauvais état d'ici 2030, et plus de 80% des Belges sont du même avis en ce qui concerne la restauration d'au moins 90% de la nature terrestre et marine en mauvais état d'ici 2050. L'enquête montre également que plus de 80% des Belges de part et d'autre de la frontière linguistique estiment que nos gouvernements devraient prendre des mesures supplémentaires pour veiller à ce que les espaces naturels ne se détériorent pas (indépendamment du fait que des mesures de restauration aient déjà été prises dans ces zones). Nous constatons également que 83,6 % des Belges pensent que nos gouvernements devraient faire plus d'efforts pour améliorer la biodiversité dans les zones agricoles. Les autres principes de la loi sur la restauration de la nature, tel que la restauration des rivières (90,3%), l'augmentation des populations et de la diversité des pollinisateurs (88%) et la restauration de la nature de grande valeur à l'intérieur et à l'extérieur des réserves naturelles (81,6%), sont également largement soutenus. Le WWF a en outre calculé que la restauration de notre nature coûterait environ 286 millions d'euros par an d'ici à 2030. Lorsque nous avons présenté ces chiffres au panel iVox, près de 80% des personnes interrogées ont déclaré qu'elles pensaient toujours que la Belgique devait mettre en œuvre la loi sur la restauration de la nature.
L'heure de vérité pour la nature
En boycottant la loi sur la restauration de la nature, certain·es politicien·nes vont donc à l'encontre des convictions des Flamand·es, des Bruxellois·es et des Wallon·nes, qui veulent restaurer et protéger notre environnement. Nous sommes toutes et tous conscient·es que la nature est une clé essentielle pour bien vivre en Belgique, avec de l'eau pure, de l'air sain, suffisamment d'espaces verts, une agriculture résiliente et des tampons face aux catastrophes climatiques. Mais plusieurs décideurs et décideuses politiques ne suivent pas ce raisonnement et restent guidé·es par des intérêts autres que ceux de la population.
Le slogan d'Earth Hour est « La plus grande heure pour la nature ». Lors du vote du Conseil de l'UE, il pourrait devenir « L’heure de la plus grande défaite pour la nature ». Nous ne devons pas laisser faire cela, car n'oublions pas que la nature, c'est nous toutes et tous.
À propos de l'étude iVox :
iVox a été mandaté par le WWF-Belgique pour réaliser entre le 14 et le 19 février 2024 un sondage sur les attitudes citoyennes et les politiques liées à la nature auprès de 2.000 Belges âgé·es de plus de 18 ans et représentatifs par langue, région, genre, âge et niveau d'éducation. La marge d'erreur maximale pour un échantillon de 2.000 répondant·es au sein de la population belge est de 2,08%.
L'étude peut être consultée ici : https://wwf.be/fr/publication/resultats-dun-sondage-aupres-des-belges-sur-les-politiques-concernant-la-nature
À propos d’Earth Hour :
Earth Hour est la plus grande mobilisation annuelle pour la planète, créée par le WWF en 2007. Le 23 mars 2024 à 20h30, des millions de personnes se mobiliseront ou éteindront les lumières pour attirer l’attention sur la crise globale du climat et de la biodiversité. Comme de nombreux autres monuments à travers le monde (tour Eiffel, Opéra de Sydney…), les lumières de la Grand-Place de Bruxelles et de l’Atomium s’éteindront symboliquement à 20h30 pour une durée d’une heure. En parallèle, à l’intérieur de la Bourse de Bruxelles, plongée dans l’obscurité, une « silent disco » sera organisée pour célébrer la nature et créer des liens grâce à la musique. L’événement est gratuit et accessible à toutes et à tous. Il est organisé en collaboration avec la Ville de Bruxelles.
Plus d’informations : https://wwf.be/fr/campagnes/earth-hour
À propos du Jour du Dépassement :
Tous les ans, l’ONG Global Footprint Network calcule « le Jour du Dépassement » sur base de trois millions de données statistiques de 200 pays. Il s’agit du jour à partir duquel nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres, construit et cultivé sur plus de terres que ce que la nature peut nous procurer au cours d'une année. Cela marque également le moment où nos émissions de gaz à effet de serre auront été plus importantes que ce que nos océans et nos forêts peuvent absorber. A partir du 23 mars 2024, notre pays a épuisé son crédit de ressources naturelles que la Terre est capable de produire en un an. En d’autres termes, il nous faudrait plus de quatre planètes si toute l’humanité vivait comme en Belgique ! C'est beaucoup plus que l'empreinte globale de l'humanité, qui utilise en moyenne les ressources que pourrait produire 1,7 Terre. C’est pourquoi le Jour du dépassement Belge arrive quatre mois avant la date du Jour du Dépassement de la Terre, tombé le 2 août l’année dernière.
Contact Hans Moyson Media Relations Manager WWF-Belgique [email protected] +32 (0) 472 01 17 06 +32 (0) 2 340 09 43 À propos du WWF (World Wide Fund for Nature) Depuis 60 ans, le WWF est l’une des principales organisations indépendantes de préservation de la nature et l’une des plus expérimentées. Il compte plus de cinq millions de membres, donateurs et donatrices, au sein d’un réseau mondial actif dans plus de 100 pays. Le WWF coopère avec d’autres acteurs et actrices pour mettre fin à la dégradation des milieux naturels sur la planète et œuvrer à un avenir où les humains vivront en harmonie avec la nature, par la conservation de la diversité biologique, la promotion d’une utilisation durable des ressources naturelles et la lutte contre la pollution et le gaspillage. Les 10 prochaines années seront cruciales pour aborder les principales menaces qui pèsent sur la nature et sur l’humanité. |