Les écogardes, gardien·nes de la santé planétaire
Les écogardes, gardien·nes de la santé planétaire
Si notre planète fait face à de nombreux défis sans précédent, ils seraient encore bien pires sans les écogardes. Souvent sous-estimés et sous-équipés, ces professionnels jouent pourtant un rôle crucial dans la gestion des espaces protégés... et bien plus encore.
Le 31 juillet marque chaque année la Journée mondiale des écogardes, ou rangers. Ces personnes endossent discrètement l’un des rôles les plus importants de la planète : ils sont responsables de la protection de la nature, du patrimoine culturel et historique, ainsi que des droits et du bien-être des générations actuelles et futures.
Ils contribuent ainsi à la régulation du climat, à la préservation des ressources en eau, à la gestion des espèces envahissantes ou encore à la diminution des risques de propagation de zoonoses. Rien que ça ! Alors pour atteindre les objectifs en matière de conservation à l’échelle mondiale, ils sont tout simplement indispensables.
Défis et conditions de travail
On pourrait logiquement penser que les personnes qui prennent soin de notre planète au quotidien, tout en mettant leur sécurité et santé en danger, seraient valorisées pour leurs efforts. En réalité, c’est tout l’inverse.
Globalement, les conditions de travail des écogardes sont souvent extrêmement précaires. Le manque d’équipement pour accomplir leurs tâches est flagrant, à quelques exceptions près. « Les écogardes, c’est parfois les tongs, parfois les bottines trouées. Et ce sont eux qui sont responsables de la santé de notre planète ! », souligne Rohit Singh, du WWF-Singapore. Leur salaire est inférieur à celui des policiers, et les retards de paiement sont fréquents. Enfin, seul un tiers bénéficient de régimes d’assurance en cas de décès ou de blessures graves.
Entre mai 2023 et juin 2024, 140 sont morts sur le terrain. « On parle souvent des écogardes assassinés. Il y en a chaque année, c’est vrai et dramatique. Encore 38 les 12 derniers mois. Mais on oublie souvent que les causes sont diverses et qu’elles ne feront que se multiplier avec l’aggravation du changement climatique et de l’exploitation de la nature », explique Rohit Singh.
Diversification des rôles des écogardes
Face à l’aggravation du changement climatique et de la perte de biodiversité, le rôle des écogardes se diversifie et s'étend, et leur sécurité s’amenuise en parallèle. « 26 % des décès de l’année écoulée sont dus aux impacts du changement climatique, comme les incendies ou les inondations. Ce sont 31 personnes ! » Les écogardes sont désormais bien plus encore que des agents de la loi.
Souvent, ils sont les premiers, voire les seuls, à apporter l’aide d’urgence dans les zones reculées. « Dans bien des cas, ils sont les seuls à pouvoir protéger les populations locales et leurs biens des désastres écologiques, des attaques d’animaux sauvages ou des épidémies. Ils ne peuvent donc pas simplement dire « ce n’est pas notre rôle ». En septembre dernier au Pakistan par exemple, ils ont amené énormément de personnes des communautés locales jusqu’à l’hôpital. Ils ont partagé leurs rations de nourriture avec les gens dans le besoin. »
Ce sont eux qui mettent aussi en place des techniques pour prévenir les conflits entre humains et animaux. Parfois aux dépens de leur vie. « 36 personnes sont décédés à la suite d’une attaque causée précisément par l’animal qu’ils protégeaient. Et là aussi, ce nombre ne fait qu’augmenter, puisqu’on empiète de plus en plus sur les espaces naturels. »
Par ailleurs, ils participent aussi au développement de l’écotourisme, à la recherche scientifique, à l’éducation environnementale et fournissent des soins médicaux. Souvent issus de communautés locales, ils sont l’unique pont d’accès entre les autorités et les populations indigènes.
« Tout ça ne fait évidemment pas partie de leurs attributions. Personne ne parle de comment ils protègent les humains et les biens, en plus de la nature et des animaux. Et donc, on ne leur donne ni les équipements ni les formations nécessaires. », déplore Rohit Singh.
Recommandations pour une meilleure reconnaissance
Pour répondre aux nouveaux défis mondiaux, il est urgent de professionnaliser les écogardes et de reconnaître leur rôle élargi. « Imaginez que vous travaillez derrière un ordinateur pour une entreprise qui vous demande d’ajouter à vos attributions la photographie et l’organisation d’événements. Si vous acceptez, la moindre des choses est que vous soyez reconnu pour ces responsabilités supplémentaires. Pour les écogardes, c’est la même chose », explique Rohit Singh.
Au WWF, nous tentons de combler les trous au maximum. Tous les écogardes de nos projets sont aidés de diverses manières. Uniforme, bottines, rations de nourriture, compensations financières, équipement de communication… Mais malgré tous nos efforts, nous ne pourrons jamais nous substituer à une reconnaissance internationale et nationale.
La coalition Universal Ranger Support Alliance (URSA) demande donc une reconnaissance internationale, des conditions de travail améliorées, la professionnalisation du métier, et l’intégration de leur rôle dans stratégies de conservation.
Des occasions de changer les choses d’ici 2025
D’ici à la fin d’année, plusieurs événements mettront en lumière leur rôle essentiel. En octobre se tiendra le dixième World Ranger Congress (Congrès mondial des écogardes) à Hyères, en France. La COP CBD sur la biodiversité organisera un événement majeur autour de la reconnaissance de leurs rôles. Espérons que ce soit l’occasion de faire bouger les lignes pour ces femmes et ces hommes qui, jour après jour, s’efforcent de protéger ce que d’autres détruisent. Car en investissant dans les écogardes, nous investissons dans l'avenir de notre planète et de ses habitants.
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