La COP16 déçoit, mais la Belgique prend des engagements
La COP16 déçoit, mais la Belgique prend des engagements
Certains progrès ont été réalisés lors de la COP16. Mais le report de décisions clés pourrait entraver la pleine mise en œuvre du Cadre mondial pour la biodiversité. Point positif tout de même : en rejoignant un groupe de « champions » qui vise notamment à intégrer la biodiversité dans tous les secteurs de l’économie, la Belgique signale son intention d'intensifier les efforts autour de la biodiversité.
196 pays ont participé à la conférence des Nations unies sur la biodiversité COP16 qui se tenait à Cali, en Colombie. Elle s’est terminée au petites heures le samedi 2 novembre 2024, avec la moitié des pays représentés déjà partis. Globalement, cette COP16 déçoit : l’ambition montrée n’est pas à la hauteur de l’urgence. Cependant, quelques pas ont été faits dans la bonne direction.
Les avancées à mettre en lumière
Saluons tout d’abord la création d’un nouveau fonds mondial, le « Fonds de Cali », pour partager équitablement les bénéfices issus des « informations de séquençage numérique sur les ressources génétiques » (DSI en anglais).
Cela signifie que les entreprises qui utilisent des données génétiques issues de la nature dans leurs produits doivent verser une partie de leurs bénéfices ou de leurs revenus au fonds. Jusqu’à présent, les informations contenues dans les bases de données étaient accessibles gratuitement pour la plupart, alors qu’elles génèrent des milliards de dollars de revenus (notamment en médecine). Bien que les détails du versement restent à finaliser, il a été convenu que 50 % du fonds serait alloué aux peuples autochtones et aux communautés locales, soit directement, soit par l'intermédiaire des gouvernements. Cela permettra à ces communautés, y compris aux femmes et aux jeunes, de récolter enfin une part des bénéfices.
Seconde bonne nouvelle, les gouvernements ont formellement reconnu et intégré les communautés indigènes dans le processus décisionnel des Nations unies. Depuis 20 ans, ces populations n’ont disposé que d’un groupe de travail informel dans le cadre du processus des Nations unies sur la biodiversité. Il est désormais devenu organe permanent.
D’autres légères avancées sont à noter, comme l'adoption d'un plan d'action sur la biodiversité et la santé, reconnaissant le lien entre les deux. Des engagements ont également été pris pour créer des synergies futures avec la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, un signal important lancé à quelques jours de la COP29.
Ces petits pas ne suffiront pourtant pas à enrayer la chute catastrophique de la biodiversité que subit notre planète. L’urgence de la situation n’est toujours pas adressée à l’échelle nécessaire pour espérer un réel changement de paradigme. Rappelons par exemple que la plupart des pays n’ont même pas remis de plan national au début de la COP16, comme exigé.
Des décisions importantes reportées
Après une négociation marathon de 24 heures, les discussions sur la création d'un nouveau fonds plus large pour la biodiversité ont été suspendues et reportées : il n'y avait plus assez de négociateurs dans la salle pour prendre des décisions ! Lors de la COP15, les pays s’étaient en effet engagés à rassembler 200 milliards de dollars par an d’ici 2030. La stratégie pour y parvenir devait être fixée lors de cette COP16. Ce ne fut pas le cas.
D'autres décisions importantes, pourtant fixées comme priorités de la COP16, ont également été reportées. Par exemple, la méthode dont les objectifs de cette décennie seront suivis et contrôlés n’a pas été arrêtée. Cette situation risque de saper la confiance dans le cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal et de compromettre sa mise en œuvre.
Cette situation est inacceptable et nous concerne tous et toutes. La mission de stopper et d'inverser la perte de la nature d'ici 2030 n'était déjà pas évidente, et maintenant, nous nous éloignons dangereusement de notre objectif
Un groupe de champions, dont la Belgique fait partie
Peu avant la fin de la COP16, les gouvernements nationaux d'un groupe de pays*, dont la Belgique, ont créé un « groupe de champions de l'intégration » (« Mainstreaming Champions Group » en anglais). Ce groupe vise à généraliser la prise de conscience et les efforts autour de la biodiversité. Ces pays souhaitent par exemple que les objectifs et les principes du Cadre mondial pour la biodiversité soient davantage intégrés dans tous les secteurs de l'économie mondiale.
Plan d'action
« En rejoignant ce groupe, la Belgique signale sa détermination à prendre en compte la biodiversité de manière ambitieuse dans des secteurs tels que l'alimentation, l'agriculture, l'énergie et la pêche », a précisé Laurence Drèze, chargée de politique biodiversité au WWF-Belgique. Ce signal doit maintenant être reflété dans la stratégie nationale pour la biodiversité, qui est actuellement toujours en cours de révision. Il devrait bientôt déboucher sur un plan d'action précis et mesurable, qui indiquera clairement la contribution de la Belgique à l’objectif mondial d'arrêter et d’inverser la perte de biodiversité d’ici à 2030.
Les régions, dont la Wallonie et la Flandre, jouent un rôle important dans la réalisation des objectifs nationaux en matière de biodiversité. Elles doivent donc prévoir les ressources, y compris financières, pour y parvenir.
Biodiversité en chute libre
Au début du mois d’octobre, la dernière édition de notre Rapport planète vivante alertait le monde sur une chute dramatique de 73 % des populations moyennes de vertébrés sauvages en 50 ans.
Pendant la COP16, l’IUCN a quant à elle présenté une nouvelle mise à jour de sa Liste rouge des espèces menacées d’extinction. Pour la première fois, la majorité des arbres dans le monde ont été ajoutés à la liste et plus d’un tiers des espèces suivies (38 %) sont menacés d’extinction (terme qui regroupe des degrés différents de menace, allant de « vulnérable » à « en danger critique »). Pour le reste des espèces, on dépasse les 25 %. Le hérisson commun notamment fait sa triste entrée dans ce palmarès funeste, désormais listé comme « quasi menacé ».
*Outre la Belgique, ces pays sont également membres du « Mainstreaming Champions Group » : Afrique du Sud, Allemagne, Colombie, Mexique, Canada, Chili, Costa Rica, Espagne, Fidji, Finlande, France, Géorgie, Mauritanie, Pérou, Portugal et Zambie. D'autres pays devraient bientôt rejoindre le groupe.
Vous pouvez agir en signant notre lettre ouverte pour exiger de nos gouvernements de prendre des mesures plus fortes pour lutter contre la perte de nature et le changement climatique.
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