Ces agricultrices transforment les braconniers en protecteurs de gorilles

Ces agricultrices transforment les braconniers en protecteurs de gorilles

Dans le cœur humide et luxuriant du Parc national de la forêt impénétrable de Bwindi, en Ouganda, se trouve le village de Mpungu. Une localité notamment connue pour sa nature à la beauté sauvage, son attrait ornithologique, son importante population de gorilles de montagne… mais aussi pour son braconnage. Toutefois, un groupe d’agricultrices, soutenu par l’International Gorilla Conservation Programme (IGCP), est bien parti pour changer la donne et redorer la triste réputation de la localité, en militant activement contre le braconnage auprès de leurs concitoyen·nes.

Le village de Mpungu possède une funeste renommée en tant que bastion de braconniers parmi les plus dangereux en Ouganda. En effet, ceux-ci n’hésitent pas à s’aventurer dans les zones strictement protégées du parc. Ils utilisent des chiens et des pièges à collet pour attraper des animaux sauvages et alimenter le trafic de viande de brousse. Si les gorilles ne sont pas toujours la cible principale des braconniers, ils peuvent néanmoins succomber aux blessures provoquées par ces pièges, ou être contaminés par des maladies transmises par les personnes entrant illégalement et sans précaution dans le parc. Étant donné leur proximité génétique avec l’humain, les grands singes sont extrêmement vulnérables à nos maladies. Un simple rhume peut leur être fatal.

Malgré plusieurs avertissements et arrestations par les autorités du parc, la tendance au braconnage était en augmentation ces dernières années autour du parc. Mais récemment, un groupe de militantes a pris les choses en main. Ces femmes, mères, filles ou épouses de braconniers pour la plupart, sont en effet bien déterminées à écrire une autre histoire, tant pour les habitant·es de Mpungu que les gorilles de montagne qui peuplent le parc.

Étant donné leur proximité génétique avec l’humain, les grands singes sont extrêmement vulnérables à nos maladies. Un simple rhume peut leur être fatal.


L’IGCP, avec qui le WWF-Belgique collabore depuis 2019 pour protéger les gorilles, a formé jusqu’à présent 26 femmes de Mpungu et ses alentours afin qu’elles deviennent de véritables ambassadrices de la protection des gorilles et de la faune du parc. Après leur formation, ces femmes consacrent leur temps à sensibiliser la communauté contre le braconnage et ont déjà transformé environ 40 braconniers en protecteurs de gorilles, en commençant par les plus proches. « Nous avons un programme de sensibilisation en porte-à-porte, où nous parlons des dangers du braconnage et des avantages de la conservation pour les communautés en bordure de parc », explique Vastina Kyampeire, Présidente du groupe. En plus de reconnaître les faits, il arrive que lors de ces visites, les braconniers aiguillent les militantes vers d’autres braconniers, démultipliant ainsi la portée de l’action de sensibilisation.

« Nous avons découvert une autre manière de gagner notre vie sans empiéter sur le parc. Nous avons également appris que nous ne pouvons bénéficier du tourisme que si nous luttons contre le braconnage. »


Les agricultrices de Mpungu ont également reçu de l’IGCP un soutien pour investir dans la culture d'oignons. Le projet a contribué à réduire les conflits entre humains et faune sauvage, car les oignons, à l’inverse d’autres fruits et légumes cultivés dans la région, n’attirent pas les gorilles. Les revenus générés par la culture d’oignons ont permis aussi d’induire un changement de comportement. « Nous avons découvert une autre manière de gagner notre vie sans empiéter sur le parc. Nous avons également appris que nous ne pouvons bénéficier du tourisme que si nous luttons contre le braconnage », explique Jane Tugumisirize, épouse d'un ancien braconnier.

Après une récolte d'oignons exceptionnelle, les femmes de Buremba ont trouvé un meilleur moyen de gagner leur vie sans empiéter sur le parc.
Après une récolte d'oignons exceptionnelle, les femmes de Buremba ont trouvé un meilleur moyen de gagner leur vie sans empiéter sur le parc.


Les agricultrices ont récolté plus de 45 sacs (4 500 kg) et ont vendu chaque sac à 68 $. Selon Vastina Kyampeire, elles ont réalisé un profit d'environ 1 222 $. « Nos maris ont renoncé au braconnage après avoir reçu les fonds de l'IGCP, et encore plus après la récolte abondante. Ils ont réalisé que chasser pour de la viande de brousse n'était pas un moyen durable de vivre », ajoute-t-elle

Cette histoire témoigne de l'importance d'une approche de conservation inclusive. « Pendant longtemps, les femmes ont été exclues de nombreuses initiatives de conservation, entraînant des impacts massifs et négatifs. L'implication des groupes de femmes autour du Parc national de la forêt impénétrable de Bwindi dans la planification et la mise en œuvre a conduit à plusieurs solutions de conservation contre le braconnage et les conflits entre l’humain et la faune. » explique Henry Mutabaazi, coordinateur de l'IGCP en Ouganda. Maintenir ces initiatives contribue de manière significative à la protection des gorilles de montagne dans la région.

C’est grâce aux dons que nous recevons que nous pouvons soutenir ces initiatives et faire des communautés locales nos meilleures alliées contre le braconnage des gorilles.
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