Rencontre avec Rida, ranger au Cambodge
Rencontre avec Rida, ranger au Cambodge
Sans leur travail, il serait illusoire d’espérer le retour du tigre dans les forêts du Mondulkiri. Les rangers s’entraînent dur et luttent au quotidien pour protéger les écosystèmes et la vie sauvage dans les plaines orientales du Cambodge. Nous en avons discuté avec la première femme ranger du Mondulkiri. Accrochez-vous, il va y avoir de l’action.
Pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment vous êtes devenue ranger dans les forêts du Mondulkiri ?
Je m’appelle Rida Kheng et je suis née en 1996 dans la province du Mondulkiri. Enfant, j’ai assisté à la destruction de la forêt. J’ai aussi constaté la disparition des animaux sauvages et l’assèchement de la rivière autour de chez nous, ce qui m’attristait fortement. Le climat s’est mis à connaître des changements brusques, passant soudain du chaud au froid. Je ne le savais pas encore, mais tout cela était lié à la déforestation. J’ai toujours été fascinée par la nature. Plus tard, j’ai donc décidé de me lancer dans des études de foresterie. Cela m’a permis d’avoir une compréhension globale des forêts et de ce qui les rend tellement vitales pour nous. Lorsque j’ai été embauchée, je pouvais choisir entre un travail de bureau et un travail de terrain. Je n’ai pas hésité…
Comment concevez-vous votre travail de ranger et votre rôle de défenseure de la forêt ?
En travaillant sur le terrain, je peux continuer à apprendre sans cesse, tout en agissant pour protéger la forêt. Mais mon objectif ne se limite pas à cela. En me basant sur les connaissances des écosystèmes naturels et de leur importance pour l’avenir de la planète, je veux faire vraiment la différence en m’adressant aux gens qui m’entourent : ma famille, mes amis ou mes collègues rangers. Mieux comprendre l’écosystème forestier, cela crée un attachement encore plus fort et nous rend encore plus déterminés à le protéger. Je voudrais donc continuer à me former, mais aussi éduquer les communautés villageoises, surtout celles qui vivent à proximité de la forêt, pour les convaincre de l’importance de garder une forêt en bonne santé. Les arbres sont essentiels pour tous, non seulement parce qu’ils nous fournissent des matériaux de construction ou de médicaments, mais aussi parce qu’ils fonctionnent comme une barrière protectrice qui préserve nos ressources naturelles.
La déforestation est-elle le seul problème que vous observez ?
Non, bien entendu. Il y a également la pollution. Je vois souvent des gens jeter des déchets de plastique dans la rivière. Cela me rend furieuse. Ils n’ont tout simplement pas conscience des conséquences de leurs actes. Heureusement, je constate une prise de conscience autour de moi. D’ailleurs, beaucoup d’amis sont très curieux de mon travail en tant que ranger.
« Il faut protéger les forêts parce qu’elles ne peuvent le faire elles-mêmes. »
Rida Kheng
Comment s’est passée votre intégration dans l’équipe ?
Je ne dis pas que c’est un travail facile. C’est même parfois très dur. Mais la passion permet de surmonter bien des difficultés. Et quand on est bien entouré, tout devient plus simple. Vous savez, on passe pas mal de temps à patrouiller à moto dans 50 cm de boue et cela m’arrive d’être sérieusement embourbée ! Dans ces cas-là, il y a toujours un coéquipier à mes côtés. L’entraide fait vraiment partie de notre quotidien. Mais l’entraînement aussi est essentiel. J’ai suivi une formation de deux semaines avec l’armée cambodgienne ! Chaque matin, nous devions courir 7 km et le soir, nous marchions 25 km avec une arme et un sac-à-dos.
Quel message souhaitez-vous adresser aux sympathisants du WWF ?
Je leur dirais simplement ceci : il faut protéger les forêts parce qu’elles ne peuvent pas le faire elles-mêmes. Si nous laissons les forêts disparaître, la vie sauvage qu’elles abritent disparaîtra à son tour. Et comme tout est lié, c’est finalement notre avenir qui sera menacé. En ce qui me concerne, protéger la forêt était un rêve. Et aujourd’hui, j’ai tout simplement la chance de vivre ce rêve.