Tant que la nature de la mer du Nord ne sera pas correctement protégée, l’économie bleue sera en danger

Tant que la nature de la mer du Nord ne sera pas correctement protégée, l’économie bleue sera en danger

« Dans la partie belge de la mer du Nord, l’environnement est franchement mal protégé : des pratiques perturbatrices telles que le chalutage de fond et l’extraction de sable dans les zones vulnérables continuent d’exister. L’aménagement des espaces marins est anarchique et, pendant ce temps, de plus en plus d’activités économiques en profitent pour s’y installer », dénoncent quatre grandes organisations environnementales.

 

La nature dans la partie belge de la mer du Nord ne fait-elle pas l’objet d’une législation ? Bien sûr que si. Les directives européennes strictes sur les habitats et les oiseaux s’appliquent également à notre partie de la mer du Nord. Cinq réserves naturelles marines ont également été désignées comme zones Natura 2000, dans lesquelles la législation la plus stricte en matière de protection de la nature est censée être d’application. Comment se fait-il alors que la biodiversité marine est à peine protégée ?

Une loi fédérale dépassée

Notre « loi fédérale visant la protection du milieu marin » n’est pas conforme à la législation européenne actuelle sur la nature. Une évaluation préalable des incidences sur la nature doit bien être effectuée pour tout projet prévu dans une zone Natura 2000. Mais la loi sur le milieu marin prévoit des exceptions pour la pêche, le dragage, la navigation, les activités militaires et les loisirs. Pour beaucoup d’activités, donc.

Tant que la nature de la mer du Nord ne sera pas correctement protégée, l’économie bleue sera en danger.

En conséquence, les activités y obtiennent facilement des autorisations et la mer du Nord devient extrêmement fréquentée. Autre conséquence : personne n’a aucune idée de l’impact total sur la nature dans ces zones en théorie strictement protégées. Il y a pourtant pas mal de raisons de s’inquiéter : la qualité de nos zones naturelles en mer est très médiocre. Heureusement, la loi visant la protection du milieu marin est en cours de révision par l’administration fédérale. C’est une occasion unique de remédier enfin à ces lacunes juridiques.

Un aménagement anarchique des espaces marins

Un autre problème que nous ne connaissons que trop bien sur la terre ferme est l’aménagement anarchique du territoire. De plus en plus de nouvelles activités comme l’aquaculture, ou d’activités existantes comme l’extraction de sable revendiquent une place dans notre petit coin de la mer du Nord. On n’insistera dès lors jamais assez sur l’importance d’une planification judicieuse.

À cet égard, le ministre de la Mer du Nord de l’époque a raté l’occasion de conférer une solide protection à notre nature dans la mer du Nord. L’économie bleue était au centre des préoccupations du « plan d’aménagement des espaces marin » approuvé l’année dernière. De l’espace supplémentaire pour les nouvelles activités a été créé juste à côté, ou même au beau milieu de zones Natura 2000. C’est un peu comme si on construisait aujourd’hui de nouvelles autoroutes à côté ou au beau milieu d’une réserve naturelle de premier plan comme le Parc naturel des Hautes-Fagnes. En tant que mouvement pour la nature et l’environnement, nous avons à plusieurs reprises tiré la sonnette d’alarme.

L’économie bleue en péril

Le fait que la législation sur la nature semble n’exister que sur le papier n’est pas seulement une tragédie pour la nature elle-même. Cette situation crée également une grande insécurité juridique pour les entrepreneurs en mer, actifs dans ce qu’on appelle l’économie bleue.

Le cas de la ferme maritime Westdiep à Nieuport l’a clairement mis en évidence. Sur la base du plan d’aménagement des espaces marins, la société anonyme Codevco V a été la première à solliciter la création de la ferme marine « Westdiep », un projet d’aquaculture à grande échelle situé dans l’une des zones de projets. Au cours de l’enquête publique, nous avons fait part de nos préoccupations et avons à nouveau averti les décideurs politiques de l’incertitude juridique qui résulterait de cette approche. Malheureusement sans résultat. Même si le mouvement pour la nature et l’environnement n’est certainement pas opposé à l’activité en tant que telle, nous n’avons pas d’autre choix que de nous adresser au Conseil d’État.

Pour être clair, le mouvement pour la nature et l’environnement n’est pas opposé à l’aquaculture. L’aquaculture basée sur des espèces indigènes ne nécessitant pas de nutriments supplémentaires, comme la mytiliculture, n’est pas nécessairement mauvaise pour la nature et l’environnement. Le problème réside principalement dans le choix du site : avec l’avènement de Westdiep, ce sont les quelques derniers refuges pour la nature dans une mer du Nord de plus en plus fréquentée qui seraient une fois de plus rabotés.

Une bonne protection de la nature peut concilier économie et environnement

Tant que la préservation de la nature en mer du Nord ne sera pas mise en pratique, nous, mouvement pour la nature et l’environnement, serons contraint de prendre les choses en main et d’engager des poursuites judiciaires.

C’est une voie que nous, défenseurs de l’environnement, préférons ne pas emprunter. La protection de la nature et le développement économique sont tous deux nécessaires. Nous demandons donc que des mesures soient prises dès aujourd’hui pour protéger la nature en mer et pour faire en sorte que des initiatives telles qu’une ferme marine puissent voir le jour, mais en dehors des zones Natura 2000.

Cet article d’opinion a été écrit par :

Erik Grietens (Bond Beter Leefmilieu)
Krien Hansen (Natuurpunt)
Mathieu Soete (Greenpeace)
Sarah Vanden Eede (WWF).