Le long chemin vers un chocolat belge durable

Le long chemin vers un chocolat belge durable

Le jeudi 18 juin, le partenariat "Beyond Chocolate" a présenté un premier rapport sur la durabilité sociale et environnementale du secteur du chocolat belge. Le WWF salue l’initiative mais souligne qu'il reste beaucoup de travail à faire avant de pouvoir réellement parler de chocolat belge sans déforestation. Selon un précédent rapport du WWF, le secteur mobilise un million d'hectares de plantations de cacao dans des pays à haut risque de déforestation. 

 

Pour la première fois, Beyond Chocolate publie une évaluation de la durabilité du chocolat belge. Selon le WWF-Belgique, le rapport donne un bon aperçu de la situation actuelle et des principaux défis à relever dans les années à venir. Beyond Chocolate a vu le jour en 2018 sous la forme d'un partenariat entre le gouvernement belge, le secteur du chocolat et la société civile pour mettre fin à la déforestation à grande échelle dans les pays d'origine du cacao et pour payer un prix équitable aux producteurs.

Concrètement, les promesses suivantes ont été faites : veiller à ce que les importations de cacao soient exemptes de déforestation d’ici 2025 dans les principaux pays d’origine d’Afrique de l’Ouest. Et au plus tard en 2030 pour les autres pays d’origine du cacao. Le WWF-Belgique a montré en 2019 que le secteur du chocolat belge mobilise au moins un million d'hectares de plantations de cacao dans des zones à haut risque de déforestation, ce qui représente la deuxième plus grande empreinte après le soja.

Les normes de certification doivent être évaluées  

 Le rapport indique qu'environ 50 % du cacao utilisé dans la production de chocolat de couverture (le produit de base avec lequel le chocolat fini est fabriqué) en Belgique possèdent au moins une norme de certification ou un programme de durabilité. La nuance est à juste titre ajoutée que la certification ne signifie pas automatiquement la durabilité et qu'il faut évaluer dans quelle mesure les différents régimes contribuent aux objectifs de l'arrêt de la déforestation. Les trois principaux systèmes de certification du cacao (Utz, Rainforest Alliance et Fairtrade) ont différents niveaux de protection des forêts et ne protègent pas toute les forêts naturelles (voir ce rapport de la Banque mondiale). Le WWF-Belgique attend avec impatience l'analyse comparative, qui devrait évaluer de manière critique les critères de durabilité de ces régimes, mais aussi leur crédibilité en termes de gouvernance, de transparence et d'application sur le terrain. 

L’origine obscure du cacao  

Afin de démontrer que le cacao est exempt de déforestation, il doit être traçable jusqu'à son lieu d'origine. Mais c'est là que le bât blesse pour le secteur du chocolat belge : selon le rapport Beyond Chocolate, plus de la moitié du chocolat belge a une origine inconnue. Il est donc impossible de prouver qu'il n'y a pas eu de déforestation. Cela concerne la "chaîne d'approvisionnement indirecte" dans laquelle le cacao, souvent cultivé illégalement dans des parcs naturels, est vendu à divers intermédiaires avant d'arriver au négociant international. Jusqu'à présent, les entreprises de Beyond Chocolate ont principalement investi pour lutter contre la déforestation dans leur chaîne d'approvisionnement directe, en achetant le cacao directement au producteur. Le WWF encourage toutes les entreprises à mettre en œuvre les recommandations du cadre international de responsabilité “Accountability Framework” afin d'améliorer la transparence et la visibilité de la chaîne d'approvisionnement.

Béatrice Wedeux, chargée de politiques Forêts au WWF-Belgique: « Le rapport expose le principal point aveugle du secteur du cacao, là où se cache potentiellement la destruction de précieuses forêts. Pour le WWF, c’est une priorité pour les partenaires de Beyond Chocolate et les gouvernements des pays concernés de s'attaquer à ce problème et arriver à une meilleure transparence du secteur. »

Il est grand temps d'instaurer des conditions de concurrence équitables en Europe

Avec de grandes entreprises internationales comme acteurs majeurs du secteur et un commerce intracommunautaire européen important, le rapport reconnaît les difficultés de mesurer l’impact du marché belge sur le terrain. C'est pourquoi, selon le WWF, outre les initiatives nationales, il est essentiel de poursuivre l'élaboration d'une législation européenne qui créera des conditions de concurrence équitables sur le marché européen et offrira les mêmes garanties aux consommateurs de toute l'Europe. Nous encourageons tous les partenaires de Beyond Chocolate à plaider en faveur d'une loi européenne interdisant la mise sur le marché européen de produits liés à la conversion et à la dégradation des forêts et des écosystèmes. En 2021, la Commission européenne prévoit une proposition de loi en ce sens.

Béatrice Wedeux : « La protection des forêts touche à de nombreux défis auxquels nous sommes confrontés : le changement climatique, la crise de la biodiversité mais aussi les crises sanitaires comme l'épidémie de Covid-19. Les pays consommateurs doivent prendre leurs responsabilités et cesser de donner des débouchés aux produits provenant de zones déboisées. »

Les forêts sont essentielles pour une culture durable du cacao  

Environ 80 % des forêts tropicales humides d'Afrique de l'Ouest ont été remplacées par l'agriculture, principalement pour le cacao. La disparition de ces forêts n'est pas seulement un désastre pour la biodiversité, mais elle modifie également les régimes climatiques locaux, ce qui rendra de nombreuses zones non propices à la culture du cacao. Pour assurer l'avenir du chocolat, il est donc nécessaire non seulement d'investir dans la protection des forêts encore existantes, mais aussi de restaurer les réserves naturelles dégradées.