Le soja

Quand le soja envahit la savane et la forêt

Cultivé dans d’immenses exploitations sur le continent américain, le soja est une légumineuse dont les fèves comestibles offrent une forte teneur en protéines et en matières grasses.

Mondialement, sa production a triplé depuis 1990 pour atteindre 348 millions de tonnes en 2018, principalement en raison de son utilisation dans la nourriture pour animaux et les agrocarburants.

Les États-Unis, le Brésil, l’Argentine et le Paraguay assurent à eux seuls près de 50 % de la production mondiale. Or la culture intensive du soja menace les forêts et d’autres écosystèmes naturels importants.

Du soja pour nourrir les animaux

L’Union européenne (UE) est un marché de destination clé pour les pays producteurs de soja : elle importe environ 34 millions de tonnes de soja par an, ce qui équivaut à 12 % de la production mondiale. On estime que 87 % du soja utilisé dans l'UE est destiné à l'alimentation animale et donc lié à la production de viande, produits laitiers et œufs. Les poulets (poulets de chair et poules pondeuses) sont les premiers consommateurs de soja dans l'Union européenne, suivis des porcs, des vaches laitières et des bovins. Le soja restant est utilisé à la production d’agrocarburant et d’autres produits alimentaires. 

La disparition des savanes et des forêts

Au niveau mondial, environ 1 million de km² de terre agricole est dédiée à la culture du soja : une surface qui équivaut à la taille de la France, de l’Allemagne, de la Belgique et des Pays-Bas réunis. Cela génère une pression énorme sur l’affectation des sols dans les pays producteurs, en particulier en Argentine et au Brésil. Pour permettre l’expansion de la culture du soja en Amérique latine, de vastes surfaces de forêt à haute valeur environnementale - mais aussi des prairies et des savanes - sont rasées, transformées ou dégradées. 

Le recours intensif aux insecticides et aux désherbants dans les monocultures de soja, pour la plupart génétiquement modifié (OGM), pollue les sols et a de lourdes conséquences sur la qualité de l’eau et la biodiversité.

Au Brésil, 7 % du territoire du Cerrado sont recouverts de monocultures de soja, soit une superficie de la taille de l’Angleterre. Cet écosystème héberge 5 % de la biodiversité mondiale, dont 800 espèces d’oiseaux et plus de 11 000 espèces végétales. Il abrite en outre la principale ressource en eau de la population brésilienne. Des savanes précieuses qui sont malheureusement menacées aujourd’hui.

2 à 15 %
des paysages variés à haute valeur environnementale ont disparu du territoire du Gran Chaco en Argentine, avec pour principale cause la production de soja.

La part de responsabilité de la Belgique

Entre 2013 et 2017, la Belgique a importé en moyenne  2,5 millions de tonnes de soja chaque année, sous forme brute (fèves, tourteaux et huile), transformée (agrocarburants) et incorporée dans des produits alimentaires d’origine animale importés (viande, produits laitiers, œufs d’animaux nourris au soja). La demande qui ne cesse de s’accroître a engendré une augmentation de 80 % de la surface agricole mobilisée ailleurs à travers le monde. Elle est ainsi passée de 15 000 km² à 27 000 km² en cinq ans. Le soja importé en Belgique provient principalement du Brésil (33 % de l’empreinte totale), d’Argentine (26 %) et des États-Unis (12 %).

Bien que le soja soit une source de protéines pour les humains, à peine 3 % du soja utilisé en Belgique est affecté directement à la consommation humaine : environ 95 % est utilisé pour l’alimentation animale.
Dans notre pays, 90 % des porcs et des poulets sont élevés de manière intensive, avec de la nourriture dont le soja constitue la principale source de protéines.

64 %
de l’empreinte belge est associée à des risques élevés de déforestation - au Brésil, en Argentine et au Paraguay.

Trois pistes de solutions tangibles

Afin de réduire l’empreinte croissante de la culture du soja et les risques que cette culture fait peser sur les écosystèmes naturels, il existe trois solutions, pour lesquelles des leviers politiques et du secteur privés doivent être activés et fonctionner ensemble :

  • Garantir des importations de soja qui ne soient pas liées à la déforestation et la conversion d’autres écosystèmes naturels ou à la dégradation de la biodiversité, grâce à un nouveau cadre législatif européen et à un approvisionnement responsable de toutes les entreprises impliquées dans la chaîne de production.
  • Remplacer le soja utilisé dans l’alimentation animale par des légumineuses locales 
  • Réduire la consommation individuelle de soja à travers des régimes alimentaires plus pauvres en protéines animales.

Les actions du WWF

Pour mettre fin à la conversion d’écosystèmes naturels pour l’exploitation du soja, le WWF s’engage aussi bien dans les pays producteurs que dans les principaux marchés consommateurs, notamment la Chine et l’Europe. 

Nous plaidons en faveur d’une législation européenne garantissant que les produits agricoles placés sur le marché européen ne soient pas issus de zones déboisées ni liés à des violations de droits humains. Aux yeux du WWF, la législation doit également concerner la conversion de tout écosystème naturel et donc aussi des savanes comme le Cerrado. 

Nous travaillons aussi à fédérer les entreprises autour d’engagements sectoriels visant à stopper la déforestation et la conversion de l’Amazonie et du Cerrado. Nous nous efforçons de faire progresser la transparence et l’adhésion des entreprises à des critères d’approvisionnement responsables, écartant notamment la déforestation et la conversion d’écosystèmes naturels.

Nous plaidons également en faveur de subsides et d’autres formes de soutien public (ex. conseil agricole, recherches scientifiques) qui soutiennent l’autonomie alimentaire des fermes et réduisent ainsi leur dépendance au soja.

Enfin nous travaillons à sensibiliser les citoyen.nes à l’impact qu’a la consommation de produits d’origine animale et les incitons à adopter des régimes alimentaires favorisant les protéines végétales, notamment à travers le projet Eat4Change.

Déforestation importée
Arrêtons de scier la branche !