Restaurer la nature - un investissement qui rapporte
Une nature robuste est généreuse : chaque euro investi dans la restauration de la nature rapporte ainsi entre 8 et 51 euros. C'est ce que démontre un nouveau rapport de VITO, commandé par le WWF, Natuurpunt et Natagora.
Ce rapport examine trois projets belges de restauration de la nature et calcule les retours économiques et sociaux qui ressortent de ces investissements. Deux projets se trouvent en Flandre et le troisième se situe en Wallonie, mais tous trois sont des exemples de restauration de prairies humides, de marais et de tourbières. Lorsque ce type de zone naturelle est en bon était, elle peut stocker de grandes quantités de carbone, réduire l'impact des fortes précipitations et constituer des réserves d'eau en période de sécheresse. À l’inverse, lorsqu’elle est en mauvais état, cette nature dégradée peut en venir à émettre du CO2 ou à aggraver les inondations.
Le rapport calcule donc ici les retours socio-économiques de services écosystémiques tels que la purification de l'air, la réduction des coûts de soins de santé, et les revenus issus des loisirs et du tourisme.
Demerbroeken
Entre Aarschot et Diest se trouve l'une des vallées les plus précieuses de Flandre : la vallée du Démer. À l'origine, elle abritait des marais et des saulaies, mais l'intervention humaine a progressivement transformé son paysage. Le projet de restauration de la nature vise donc à diversifier la flore du Demerbroeken (prairies riches, marais de roseaux, forêts marécageuses, forêts de feuillus indigènes...), tout en améliorant la qualité et la connectivité de la zone naturelle.
Le résultat ? Chaque euro investi en rapporte huit ! Grâce à cette restauration, la zone naturelle du Demerbroeken stocke 300 tonnes de carbone en plus, capte 3 700 m³ d'eau supplémentaires, évite 1,19 million d'euros de dégâts des eaux et crée 18 emplois dans le secteur du tourisme. Mais ce n'est pas tout : chaque année, 40 000 euros en frais de soins de santé sont économisés et ses zones humides filtrent 475 kg d'azote, améliorant ainsi la qualité de l'eau. Le délai d'amortissement de ces investissements n'est que de 16 ans.
Kastanjebos
Situé dans le Brabant flamand, le Kastanjebos est une réserve naturelle Natura 2000 de 165 hectares, connue pour la splendeur de ses tapis de fleurs. La restauration de ses prairies de fauche et de ses forêts marécageuses permet au Kastanjebos de recevoir 12 500 visites supplémentaires par an, soit 105 000 euros de revenus touristiques supplémentaires et deux nouveaux emplois dans le secteur de l'horeca.
Les efforts de restauration permettent également au sol de retenir 100 tonnes de carbone supplémentaires, soit l'équivalent des émissions de deux millions de kilomètres parcourus en voiture, ce qui correspond à un coût évité de 23 000 euros par an en moyenne. Le retour sur investissement de la restauration du Kastanjebos ? Chaque euro investi en rapporte 51 – avec un délai de récupération de seulement sept ans.
Plateau des Tailles
Le Plateau des Tailles est situé au cœur des Ardennes belges, un haut plateau de forêts, de landes humides et de tourbières. Dans le passé, ces tourbières ont été asséchées pour y planter des forêts de conifères. Pour restaurer la nature, il faut donc inverser le mouvement : supprimer le drainage non naturel et abattre les plantations de résineux afin que les tourbières puissent à nouveau remplir pleinement leur rôle. Autre avantage de les restaurer ? Ce haut plateau peut à nouveau accueillir des espèces rares, telles que la cigogne noire, la bécassine des marais, la gélinotte des bois et le pic cendré.
Les processus de stockage du carbone se remettent ainsi progressivement en place : c'est au terme des 20 premières années que nous récolterons les principaux bénéfices de ces investissements. Et ceux-ci sont considérables. Avant la restauration, la zone drainée émettait plus de 320 tonnes de carbone par an ; dans 20 ans, le sol en captera 170 tonnes, soit une différence de 490 tonnes de carbone par an. La qualité de l'eau s'améliore également, car ces zones humides filtreront 280 kg d'azote de l'eau chaque année. En termes de loisirs, les retombées sont également significatives : avec 61 000 visites supplémentaires par an, les touristes dépenseront ensemble plus d'un demi-million d'euros de plus, ce qui se traduit par huit emplois supplémentaires. Les investissements sont donc rentabilisés en 12 ans, chaque euro en rapportant 25.
La restauration de la nature : une évidence
Ces trois études de cas ne laissent planer aucun doute : la restauration de la nature est un investissement intelligent qui peut rapporter jusqu'à 51 euros pour chaque euro investi. Et il ne s'agit là que des bénéfices que nous pouvons mesurer et exprimer en euros. En effet, les bénéfices « cachés » et la valeur intrinsèque de la nature sont aussi précieux qu’inestimables. Or actuellement, 95 % des habitats naturels de Belgique sont en mauvais état, et pourtant, nous nous permettons de passer à côté de cet énorme retour sur investissement… Il est grand temps d'investir dans la nature, et d’investir ainsi dans la santé, la sécurité et la prospérité de toute la population.