L'Europe est le 2e plus grand importateur de produits issus de la déforestation tropicale. La Belgique dans le top huit européen.

L'Europe est le 2e plus grand importateur de produits issus de la déforestation tropicale. La Belgique dans le top huit européen.

COMMUNIQUÉ DE PRESSE                                                                                   EMBARGO :  14 avril à 00h01

L'Europe est le 2e plus grand importateur de produits issus de la déforestation tropicale. La Belgique dans le top huit européen.

 

Bruxelles, le 13 avril 2021 – Selon un nouveau rapport du WWF[1], l'Union européenne (UE) est, juste derrière la Chine, le 2e plus grand importateur mondial de produits issus de la déforestation tropicale, avec les émissions qui y sont liées. Huit pays, dont la Belgique, sont responsables de 80 % de la déforestation importée en Europe, en raison notamment de leur consommation de soja, d’huile de palme, de café, de chocolat, de viande et d'autres produits encore. Alors que la Commission européenne doit présenter prochainement sa nouvelle proposition de loi pour lutter contre la déforestation, le rapport souligne l'urgence de s’attaquer à l'empreinte totale de la consommation de l'UE sur les forêts et les autres écosystèmes de notre planète, telles que les prairies et les zones humides.

 

Les données et les informations du rapport « Stepping Up ? The continuing impact of EU consumption on nature worldwide » ont été collectées par le Stockholm Environment Institute (SEI) et via l'initiative de transparence Trase. Le rapport met en lumière les coulisses des importations de l'UE ainsi que leur influence sur la déforestation tropicale et la destruction d'autres écosystèmes partout dans le monde.

Béatrice Wedeux, experte « Forêts » auprès du WWF-Belgique : « Les importations européennes de soja entraînent la conversion du Cerrado brésilien, la savane la plus riche en biodiversité au monde. Faute d’inclure la protection des savanes, prairies et zones humides dans la nouvelle législation, l’Union européenne continuera d’être complice de la destruction d'écosystèmes précieux pour la biodiversité et la lutte contre le changement climatique. »

Patrick Meyfroidt, professeur à UCLouvain, qui n’a pas participé au rapport : « Le rôle de la Belgique est particulièrement critique, non seulement parce qu'elle a une déforestation très élevée liée à sa consommation, mais aussi parce qu'elle est un point d'entrée clé pour les importations qui sont ensuite redistribuées vers d'autres pays européens. Outre un cadre juridique européen, des politiques nationales complémentaires et une coopération avec les partenaires commerciaux européens et dans les pays producteurs sont nécessaires.»

Une récente étude[2] de l'INBO (Institut flamand pour l'Étude de la Nature et des Forêts) confirme que l’empreinte mondiale de la consommation de la Belgique est bien plus grande que son empreinte à l’échelle nationale. En d’autres mots, cela signifie que la perte de biodiversité que provoque notre consommation à l'étranger est plus importante que la perte que nous causons en Belgique même. À hauteur de 70 % environ, l'utilisation des terres (sylviculture et agriculture, déforestation, conversion des écosystèmes) représente la principale cause de perte de biodiversité du fait de la consommation belge. 

Le rapport du WWF montre un lien direct entre la consommation de produits importés et la conversion d'écosystèmes comme les forêts tropicales ou la savane brésilienne (Cerrado). Partout dans le monde, la déforestation et la conversion des écosystèmes contribuent à la crise climatique et au déclin de la biodiversité, détruisent les moyens de subsistance des communautés locales et menacent notre santé.

À la lumière de ces constats, la Commission européenne doit s'attaquer résolument à l'empreinte de l'UE avec une proposition de loi forte et efficace. Cette législation doit empêcher tout produit ayant contribué - de manière « légale » ou illégale - à la destruction de la nature ou à une violation des droits humains d'entrer sur le marché de l'UE. Elle doit aussi aller beaucoup plus loin que les mesures volontaires et proposer des règles claires aux entreprises. Pour le moment, l'UE fait partie du problème, mais avec une bonne législation, elle pourrait faire partie de la solution.

 

Les principales conclusions du rapport :

  • L'UE est le deuxième plus grand importateur de produits issus de la déforestation après la Chine. En 2017, l'UE était responsable de 16 % de la déforestation associée au commerce international, soit 203 000 hectares et 116 millions de tonnes de CO₂. Précédée seulement par la Chine (24 %), l'Europe devance ainsi l'Inde (9 %), les États-Unis (7 %) et le Japon (5 %).
  • Entre 2005 et 2017, le soja (destiné en grande partie à l’alimentation des animaux d’élevage), l'huile de palme et la viande de bœuf ont été les matières premières impliquant la plus grande déforestation tropicale importées par l'UE, devant les produits en bois issus de plantations, le cacao et le café.
  • Durant cette période, les principales économies de l'UE - Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, France, Belgique et Pologne – ont été conjointement responsables de 80 % de la déforestation importée dans l'UE du fait de leur utilisation et consommation de matières premières associées à un risque de déforestation.
  • La demande de l'UE pour ces matières premières conduit également à la destruction d'autres écosystèmes que les forêts, comme les prairies ou les zones humides. Le rapport établit clairement des liens entre la consommation (notamment de soja et de viande ) dans l'UE et la conversion de paysages de prairies tels  que le Cerrado au Brésil et le Chaco en Argentine et au Paraguay[3], qui font partie des « fronts de déforestation ».
  • La Belgique comptabilise une déforestation importée annuelle de 14 800 ha, associée aux matières premières agricoles consommées ou utilisées comme alimentation pour les animaux d’élevage. Ceci est largement dû au soja, à l’huile de palme et au cacao.

 

 

En 2020, près de 1,2 million de personnes ont participé à la consultation publique de l'UE sur la déforestation à travers la campagne « #Together4Forests » afin d’exiger une législation forte et ambitieuse pour réduire l'empreinte de l'UE sur les forêts et autres écosystèmes. C’est la participation la plus importante de l'histoire de l'UE à une consultation publique sur un sujet environnemental. La balle est maintenant clairement dans le camp des institutions européennes qui doivent veiller à ce que la législation demandée par les citoyen.nes devienne une réalité.

Le WWF suit attentivement l'évolution et a publié récemment ses attentes pour une nouvelle législation ambitieuse. Il est essentiel que les produits et matières premières ayant contribué (ou susceptibles de contribuer) à la déforestation et/ou à la conversion ne puissent plus entrer sur le marché européen. La législation doit aussi garantir le respect des droits humains, imposer des obligations de « diligence raisonnée » aux entreprises tout comme au secteur financier et assurer la traçabilité des matières premières ainsi que la transparence de la chaîne d'approvisionnement. Il est également primordial que l'UE renforce sa collaboration avec les pays producteurs de manière à soutenir les efforts internationaux pour mettre un terme à la déforestation, à la destruction de la nature et aux violations des droits humains.

 

CONFÉRENCE DE PRESSE

Le mardi 13 avril de 10 à 11h, le WWF tiendra une conférence de presse internationale en ligne (en anglais). Inscriptions via ce lien :

Orateurs :  

  • Anke Schulmeister-Oldenhove, Senior Forest Policy Officer, WWF European Policy Office (auteure principale du rapport)
  • Michael Lathuillière, Senior Research Fellow, Stockholm Environment Institute, & Supply Chain Mapping Team Lead, Trase (fournisseur de données et d'études)

Pour toute question additionnelle :

  • Koen Stuyck, porte-parole du WWF Belgique, 0499 70 86 41

 

 

Références

[1] En 2017, l'UE était responsable à hauteur de 16 % de la déforestation associée au commerce international, soit 203 000 hectares et 116 millions de tonnes de CO₂. Source : WWF, 2021. « Stepping Up ? The continuing impact of nature worldwide ».  Rapport basé sur les données et informations collectées par le Stockholm Environment Institute / Trase.

[2] https://www.vlaanderen.be/publicaties/natuurrapport-2020

[3] Ces « points chauds de déforestation » ont aussi été identifiés dans le récent rapport du WWF sur les fronts de déforestation.

 

Remarques pour la rédaction :

Le WWF a formulé 8 demandes précises dans le cadre de la future législation contre la déforestation de l'UE :

(Demandes détaillées disponibles sur demande)

  1. Les matières premières et produits placés sur le marché de l’UE respectent les critères de durabilité environnementale prévus par la législation de l’Union, en plus des lois des pays d’origine
  2. La législation ne se limite pas à la déforestation et la dégradation des forêts naturelles mais intègre la conversion et la dégradation de tous les écosystèmes naturels
  3. L’ensemble des matières premières et produits susceptibles d’être liés à la conversion d’écosystèmes naturels sont couverts
  4. La législation intègre les violations des droits humains
  5. La législation introduit des obligations en matière de diligence raisonnée, de traçabilité des matières premières et de transparence des chaînes d'approvisionnement pour les entreprises et le secteur financier
  6. Des définitions claires sont fournies pour les termes et concepts utilisés dans la législation
  7. La législation garantit une application harmonisée et une mise en œuvre rigoureuse dans les États membres et prévoit des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives
  8. D’autres mesures pour lutter contre la destruction et la dégradation des écosystèmes naturels complémentent la législation

 

 

À propos de Trase

Trase est une initiative visant la transparence à travers les données, dirigée conjointement par le Stockholm Environment Institute (SEI) et Global Canopy, et qui révolutionne notre compréhension du négoce et du financement des matières premières qui favorisent la déforestation dans le monde. L'approche unique de la chaîne d'approvisionnement permet de réunir des données publiques disparates pour lier les marchés de consommation à la déforestation et à d'autres effets sur la Terre. Les outils en ligne gratuits disponibles et les précieuses informations de Trase aident les entreprises, institutions financières, gouvernements et organisations sociétales à prendre des mesures concrètes pour lutter contre la déforestation. Plus d'informations sur https://trase.earth/

 

A propos du WWF  

Le WWF est une organisation de protection de la nature indépendante, qui compte plus de 5 millions de sympathisants et un réseau mondial actif dans près de 100 pays. Notre mission est de mettre fin à la dégradation de l'environnement naturel de la planète et de construire un avenir dans lequel les êtres humains vivront en harmonie avec la nature, en conservant la diversité biologique du monde, en veillant à ce que l'utilisation des ressources naturelles renouvelables soit durable et en promouvant la réduction de la pollution et du gaspillage. Pour plus d'informations, consultez le site https://wwf.be/fr/