Mare Liberum... Même pour les baleines ?

Mare Liberum... Même pour les baleines ?

Docteure en biologie des mammifères marins, Els Vermeulen a assisté à la 66e conférence de la Commission baleinière internationale (CBI) en tant que membre de la délégation belge et ce, avec le soutien du WWF. Elle nous parle de la Commission et revient sur les résultats majeurs de la conférence. 

 

La Commission baleinière internationale (CBI) est une organisation inter-gouvernementale mondiale créée en 1946 et dont l’objectif initial était de contrôler la chasse à la baleine au niveau international. Aujourd'hui, la CBI est la plus grande organisation mondiale de gestion des questions relatives à la conservation des baleines et au contrôle de la chasse à la baleine. Son statut d’organisation bénévole ne l’empêche pas d’être considérée comme la référence mondiale en la matière, au vu notamment de son expertise et de ses positions rigoureuses et scientifiques.

Actuellement, la CBI compte 88 gouvernements contractants, qui se réunissent deux fois par an. Au cours de ces réunions, les pays présentent de nouvelles résolutions, qui sont discutées puis adoptées ou rejetées (par consensus ou par vote) dans le but de faire progresser les domaines d’action de l’organisation. Le fonctionnement de la CBI se base principalement sur le travail du Comité scientifique, qui se réunit chaque année et rassemble parmi les plus grands spécialistes des mammifères marins au monde.

Avec le soutien du WWF-Belgique, la cofondatrice de Whalefish, Dr Els Vermeulen, a participé en octobre à la 66e réunion de la CBI à Portoroz, en Slovénie, aux côtés de la délégation belge. La conférence, qui coïncidait cette année avec le 70e anniversaire de la CBI et le 30e anniversaire du moratoire sur la chasse à la baleine commerciale, s’est révélée globalement positive pour la conservation des cétacés.

Avancées considérables en 2016

Une résolution proposée par l’Australie et la Nouvelle-Zélande et visant à améliorer les processus de révision des programmes de la chasse à la baleine scientifique a notamment été adoptée à une large majorité. Cela se traduira par la mise en place d'un groupe de travail chargé d’examiner les rapports du Comité scientifique concernant tout cas de recherche scientifique létale. Cette résolution devrait également permettre au Comité scientifique de disposer à l’avenir de l’ensemble des données relatives à ces programmes de la chasse à la baleine scientifique afin de procéder à leur évaluation. Une autre résolution adoptée lors de la Conférence porte sur la reconnaissance de la contribution des cétacés aux services écosystémiques (notez ici l’utilisation du terme « cétacé » et non pas « baleine », plus communément utilisé). Il s’agit là d’un message fort : les dauphins et les baleines ne sont pas seulement des animaux attachants, ils nous sont aussi indispensables ! Une autre résolution plutôt intéressante, adoptée par consensus, conduira à la mise en place d’un processus de révision indépendant des accords institutionnels et de gouvernance de la CBI afin d'améliorer l'efficacité de l'organisation qui semble avoir été dans une impasse ces dernières années.

D'autres nouvelles résolutions comprennent la collaboration de la CBI avec la Convention de Minamata (concernant la pollution par le mercure) ainsi que la création d'un fonds au sein de la CBI pour permettre aux pays disposant de moyens limités de participer aux activités de la CBI. Notons également que la problématique des prises accessoires sera désormais considérée par le Comité de conservation comme une thématique à part entière ; un groupe de travail sera même affecté à cette question particulière.

D'autres bonnes nouvelles sont à mentionner, telles que le retrait d'une résolution proposée par le Ghana, la Côte d'Ivoire et la Guinée concernant la reconnaissance du droit des hommes à se nourrir de viande de baleine pour assurer leur sécurité alimentaire. Si le retrait de cette résolution s’avère positif, c’est parce que le Comité la soupçonnait de n’être qu’une façon de chercher à obtenir de nouveaux quotas de chasse à la baleine en 2018.

Une première pour le vaquita

L’avancée la plus remarquable en matière de conservation des cétacés réside dans la résolution (également adoptée par consensus) concernant le marsouin vaquita, en voie de disparition. C’est en effet la première fois qu’une résolution est adoptée pour les petits cétacés. La CBI s’est en effet engagée à soutenir le travail du gouvernement mexicain et entend apporter son aide dans la lutte contre le commerce illégal de la vessie natatoire du totoaba (espèce de poisson marin en danger critique d’extinction) et contre les filets maillants, chaque année responsables de la mort de nombreux vaquitas. Espérons que ces décisions aient été prises à temps et que les prochaines réunions de la CBI apporteront des résultats positifs.

vaquita WWF

Ajournement de la création d’un sanctuaire baleinier dans l’Atlantique Sud

Seule ombre au tableau en 2016 : l'échec de l'adoption de la résolution sur la création d'un sanctuaire baleinier dans l'Atlantique Sud, proposée par le Brésil, l'Uruguay, l'Argentine, l'Afrique du Sud et le Gabon. Cependant, il est plus que probable que la proposition sera de retour sur la table au cours des prochaines réunions plénières en 2018. Fait intéressant : ces réunions se tiendront au Brésil et seront dirigées par le commissaire japonais.

IWC map

Les baleines ont la cote

Alors que les réunions prenaient fin, les délégations belge et luxembourgeoise ont décidé de terminer sur une note positive en organisant un concours de cravates sur le thème des cétacés et à l’issue duquel les participants féminins ont pu voter pour la plus belle cravate. C’est un délégué japonais, avec sa cravate ‘Moby Dick’, qui a finalement remporté le concours. En 70 ans, jamais une telle initiative, destinée à briser les tensions et mettre fin aux débats de façon plus détendue, n’avait été proposée. Espérons qu’une autre intervention de ce type égaiera les prochaines réunions !

IWC tie

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