Rencontre inédite avec un loup en Belgique

Rencontre inédite avec un loup en Belgique

Il y a quelques jours, Yvan Mahaux est devenu la première personne à observer et prendre en photo un loup en Belgique. Les autres photos de loups déjà disponibles avaient en effet été prises par des pièges photographiques, des appareils automatiques placés dans la forêt.


Yvan travaille pour Éducation Environnement, une association chargée de la formation des Guides-nature. Nous avons rencontré ce véritable amoureux de la nature pour qu’il nous explique comment s’est déroulé ce tête-à-tête avec le loup.

De manière générale, qu’est-ce qui te pousse à te lever à 5h du matin pour aller te promener en forêt ?

L’ambiance forestière est très différente à l’aube. Les humains ne sont pas encore actifs, les bruits de leurs activités sont donc la plupart du temps absents ou assez faibles. Tandis que les animaux, eux, sont déjà bien éveillés ; le merle chante à tue-tête, les chevreuils se nourrissent dans les prairies… On peut observer beaucoup plus d’animaux qu’en journée. De plus, les lumières de l’aube sont assez uniques, les premiers rayons de soleil traversant l’humidité ambiante créent une atmosphère fantastique.

Comment s’est déroulée ta rencontre avec le loup ?

Quand on se balade tôt le matin, on est toujours sur le qui-vive, on scrute sans cesse, on est attentif aux moindres bruits, mais on ne s’attend pas à observer un loup en Belgique. Je savais que des loups étaient présents dans l’est de la Belgique mais les forêts y sont très vastes. Je n’avais donc pas vraiment d’espoir de voir le canidé. Au mieux, je pensais peut-être trouver un indice de sa présence, comme une déjection. Mais après quelques heures de marche, j’observais une zone ouverte dans la forêt quand un grand canidé a débouché sur la droite. J’ai tout de suite levé mes jumelles et reconnu le loup. Il m’a aussitôt vu et est resté quelques secondes à m’observer, le temps que je prenne mon appareil photo et que je fasse ce fameux cliché. Il a alors continué son chemin et est reparti au trot dans la forêt…

Qu’as-tu ressenti lorsque tu as aperçu le loup à seulement 50 mètres de toi ?

De la surprise bien sûr, je ne m’attendais pas à voir cet animal mythique en Belgique ! Après la surprise, une joie immense a pris le dessus. Je parcours la forêt depuis l’enfance à contempler la nature. Observer cette espèce en Belgique n’était qu’un rêve inimaginable… 

Et que penses-tu que le loup a ressenti en te voyant ?

Le loup semble avoir lui aussi été fameusement surpris, il a pris quelques secondes pour identifier ma silhouette immobile d’humain. Je n’ai pas pu bluffer comme on peut le faire avec un chevreuil ; en effet, ce dernier ne nous reconnaît pas toujours si on reste immobile et on peut alors l’observer à loisir.

Cette rencontre est-elle exceptionnelle ou est-ce désormais à la portée de toutes et tous d’observer un loup sauvage ?

Cette rencontre est en effet tout à fait exceptionnelle. Un loup a souvent un territoire de plusieurs centaines de kilomètres carrés et le croiser tient donc quasiment du miracle. J’ai eu énormément de chance. Vous pouvez bien sûr aller vous promener en Ardenne et espérer l’observer… Mais il vaut mieux espérer voir un renard ou un chevreuil sinon vous risquez de revenir déçu(e). Voici tout de même quelques conseils : restez sur les chemins - le loup adore aussi les emprunter, et promenez-vous en étant le plus silencieux(se) possible car le loup a une ouïe extrêmement fine. 

Si jamais d’autres promeneurs rencontrent ce loup, doivent-ils se sentir menacés ?

Profitez de la chance que vous avez : rencontrer un loup, c’est exceptionnel ! Le loup n’est pas un danger pour l’homme. Il peut exceptionnellement se montrer curieux, surtout si vous êtes accompagné(e) de chiens. Vous pouvez alors vous identifier en tant qu’humain en parlant calmement.

Quel est selon toi le futur de ce magnifique animal dans notre pays ?

J’espère évidemment qu’une ou deux meutes vont se former en Belgique. La densité de proies y est assez élevée (cerf, chevreuil, sanglier, etc.) et certaines zones semblent assez calmes pour accueillir des jeunes. Malgré la grande fragmentation de notre territoire, je pense que ces zones pourraient donc convenir pour l’installation de meutes car depuis les prémisses de son retour en Europe de l’Ouest, l’espèce ne cesse de m’étonner par ses capacités d’adaptation.

Au fond de moi, j’espère que le loup pourra continuer sa réinstallation naturelle car cela représente un enrichissement pour notre faune et notre patrimoine. Par ailleurs, en rencontrant les différents acteurs de la nature (éleveurs, chasseurs, naturalistes, mais aussi certains promeneurs), on remarque assez vite que le loup cristallise les passions et parfois les craintes. Un travail d’information et de démystification de cet animal sera donc nécessaire. Gageons qu’une cohabitation harmonieuse et respectueuse sera possible avec cet animal qui n’est ni ange, ni démon mais juste un animal qui chasse pour survivre. Un beau défi à relever pour notre société gangrenée par les problèmes environnementaux et qui tente pas à pas de développer de nouvelles perceptions de notre relation à la nature.

 

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