Les jeunes ont tous les droits et toutes les raisons de descendre dans la rue

Les jeunes ont tous les droits et toutes les raisons de descendre dans la rue

L’année 2019 a à peine débuté qu’un nouveau phénomène fait son apparition en Belgique : les manifestations pour le climat. La grande mobilisation « Claim the Climate » du 2 décembre a donné le ton et le 27 janvier, le mouvement a encore pris de l’ampleur mais toujours avec cette même demande : pourvoir notre pays d’une politique climatique ambitieuse. La jeunesse s’est elle aussi fait entendre en appelant nos gouvernements à prendre des mesures concrètes pour préserver leur avenir.

 

De nombreux parents se posent la question : dois-je encourager mon enfant à manifester pour le climat malgré le manque de soutien de son école ? La scolarité est importante, personne ne le conteste. Mais la jeunesse qui descend dans la rue pour protéger son avenir, c’est une bonne chose. De plus, cette manifestation ne vient pas de nulle part. Le WWF travaille avec les jeunes depuis des années à travers les « Climate challenges », ces simulations de grandes conférences climatiques organisées dans les écoles. Leur succès confirme la grande préoccupation des jeunes envers les impacts du changement climatique sur leur vie. L’enquête « Noir, Jaune, Blues » menée conjointement par la RTBF et le Soir l’an dernier a par ailleurs conclu que le climat est l’une des thématiques les plus importantes pour les jeunes interrogés. Ceux-ci constatent que les générations précédentes et actuelles épuisent la planète et ne prennent pas de mesures efficaces pour y remédier. Il n’est donc pas surprenant que les jeunes descendent dans la rue pour protéger leur avenir. En novembre, le WWF et GoodPlanet ont lancé la plateforme « Ideas4planet ». Les jeunes peuvent y proposer leurs idées pour préserver la planète et le climat jusqu’à la fin du mois de février. Le WWF procédera à une sélection qu’il soumettra ensuite aux différents partis politiques.

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Les analyses montrent que les actions de nos gouvernements ne sont pas suffisantes. En dépit de toute récupération politique, la genèse de ces manifestations se trouve dans la stagnation de la politique climatique en Belgique sur le long terme. En Wallonie, les émissions ont baissé entre 1990 et 2014 (grâce aux fermetures d’industries). Elles ont pourtant augmenté à nouveau ces dernières années. Si la Région poursuit sur cette lancée, elle manquera ses objectifs de 2020.

Après deux manifestations pour le climat qui ont rassemblé chacune au moins 75 000 personnes et les marches de jeunes qui ont compté entre 3 000 et 40 000 participants ces deux derniers mois, la réponse politique reste en suspens. Les deux seuls arguments avancés par les politiques sont vains. Le premier : « Nous avons une politique climatique ambitieuse et nous faisons beaucoup ». Cet argument peut être difficilement pris au sérieux. Nous devons également rappeler qu’il n’y a pas eu de plan national sur le climat depuis 2013. Les régions ont un plan climat mais les mesures sont loin d’être suffisantes pour faire face au changement climatique. Ce que les gouvernements entendent par « ambitieux » ne correspond pas aux recommandations du GIEC, l’organisme scientifique de l’ONU chargé de la recherche sur le changement climatique. Cela fait plusieurs mois que nos pays voisins plaident pour que l’ambition européenne soit portée à une réduction des émissions de 55 % alors que la Belgique reste muette dans toutes les langues sur les efforts supplémentaires à fournir.

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Le deuxième argument très populaire auprès des politiques : « Les individus doivent adapter leur comportement et vivre de manière plus durable. Nous, politiques, ne pouvons rien faire sans l’action des gens. » Il va sans dire que pour réduire les émissions en Belgique et dans le monde, chacun doit procéder à des ajustements dans sa vie quotidienne. De plus en plus de personnes en prennent conscience. Cependant, il est un peu facile pour les ministres de se cacher derrière ce constat. Après tout, les gouvernements disposent de leviers pour mettre en œuvre des changements sociaux qui ont un grand impact. Cela n’a rien à voir avec le citoyen qui troque sa voiture pour un vélo. De plus, c’est un non-sens d’affirmer qu’ils ne peuvent rien faire sans la volonté de la population. Relever l’âge de la retraite, ça parle à quelqu’un… ?

Le WWF constate depuis des années que la politique ne considère pas le climat. Peut-être un peu plus après les élections communales mais nous n’avons toujours pas reçu de vraie réponse à la suite des mobilisations massives de ces derniers mois. A la fin du mois de décembre, trois semaines après la marche pour le climat, la première version du plan national sur le climat et l’énergie a été soumise à l’Union européenne. Dépourvues d’ambition et de cohérence, les autorités belges considèrent qu’il s’agit d’une réponse adéquate au défi climatique. Entre-temps, le Premier ministre Michel a reçu pour la première fois une délégation du mouvement pour le climat. J'étais moi aussi présente. La discussion était certes ouverte, mais sans que nous percevions une réponse politique concrète au problème climatique. Bien qu’il soit utile de calculer le coût d’une série de petites mesures, cela ne suffira pas. À l'heure actuelle, notre pays a principalement besoin d'une vision cohérente et d'une stratégie à long terme. Une fois l’objectif fixé, il sera alors important de définir les mesures qui permettront d’atteindre cet objectif, à savoir une société neutre en carbone et ce, bien avant 2050. Faisons de 2019 l’année où la Belgique prendra son avenir en main et mettra en place et en œuvre une politique climatique efficace. L’action des jeunes n’est pas seulement utile pour leur conscience démocratique, elle est également essentielle pour continuer à faire monter la pression. Leur avenir et le nôtre en dépendent. Et tant que l'action politique ne se concrétisera pas, nous devons faire entendre nos voix. Je vous donne donc rendez-vous à la prochaine marche pour le climat !

Julie Vannanbergen

Julie Vandenberghe,
chargée des politiques Climat au WWF-Belgique