Les forêts belges face au changement climatique

Les forêts belges face au changement climatique

Nous publions aujourd’hui le dernier volet de notre série d’articles consacrée à l’impact du réchauffement climatique sur la nature en Belgique. Ce troisième article se penche sur les forêts.

 

Les forêts abritent 80 % de la biodiversité terrestre à niveau mondial. Le changement climatique et les forêts sont indissolublement liés. Les forêts et le bois qu’elles produisent stockent le CO2, jouant un rôle essentiel dans l’atténuation du changement climatique. En revanche, les forêts subissent déjà les conséquences du changement climatique : évènements météorologiques extrêmes, sécheresses et canicules causant des feux de forêts, mais également des changements plus lents qui mènent à des mutations dans les assemblages d’espèces. Les forêts belges n’y échappent pas et les effets sont déjà visibles. Il s’avère donc nécessaire de prendre des mesures dès aujourd’hui, au vu des longs cycles de vie des arbres.

Attaques d’insectes

Des épisodes de sécheresse estivale prolongée risquent d’induire un stress hydrique (manque d’eau) des peuplements. Ce stress peut avoir des impacts très différents selon les essences. Par ailleurs, tant les stress hydriques prolongés que les courtes périodes de canicule affaiblissent les arbres. Ils sont alors plus sensibles aux attaques d’insectes xylophages (insectes ravageurs). En outre, les espèces d’arbres qui peuplent nos forêts actuellement ne sont pas adaptées au climat plus aride auquel la Belgique devrait faire face dans les prochaines décennies. C’est le cas notamment de l’épicéa (une espèce d’origine montagnarde) mais aussi du hêtre qui est sensible à la sécheresse.

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Modification de la phénologie des arbres

La phénologie des arbres est la succession de leurs différents stades de développement en fonction des variations saisonnières. Elle comporte plusieurs événements majeurs : la floraison et la feuillaison par exemple. Ces phénomènes sont également impactés par le changement climatique. Ainsi, pour les feuillus (arbres produisant des feuilles bien développées), comme les chênes, le hêtre et le frêne, l’épanouissement des feuilles est avancé de six à 10 jours selon les conclusions d’une étude parue dans la revue scientifique Silva Belgica. D’un autre côté, la date de coloration des feuilles en automne, serait progressivement retardée. Cela affecte les sous-bois, riches en biodiversité, qui sont ombragés plus tôt dans l’année. Par exemple, au printemps, avant la feuillaison de la canopée, de nombreuses fleurs du sous-bois profitent du soleil printanier. Le cycle de développement de ces fleurs, et la diversité d’insectes qui en dépendent, peuvent être perturbés par une feuillaison précoce.

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Par ailleurs, selon une étude publiée dans la revue Natuur.focus, les fleurs sont également affectées par le changement climatique : dans leurs communautés, les fleurs préférant les températures fraîches, comme l’Anémone des bois, sont en partie remplacées par des espèces qui aiment davantage le chaud. Les insectes et autres espèces qui s’alimentent des plantes des sous-bois sont à leur tour confrontés à tous ces changements.

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À quoi les paysages forestiers ressembleront-ils demain ?

Des espèces comme l’épicéa, adaptée au climat froid, vont disparaître à long terme. D’autres vont être en danger comme le hêtre à cause des occurrences plus importantes de sécheresse. Tandis que d’autres espèces d’arbres vont s’installer ou être plantées en Belgique, avec une répercussion sur l’ensemble de la nature mais aussi sur l’économie liée à nos forêts.

Pour sauver nos forêts, il est primordial d’adapter la gestion et l’aménagement des paysages forestiers dès aujourd’hui :

  • Pour des forêts mixtes hautes en biodiversité, c’est-à-dire comprenant plusieurs espèces d’arbres. Ces forêts sont en effet plus stables face aux changements que des forêts monospécifiques.
  • Pour des forêts riches d’îlots d’arbres vieillissants et riches en bois mort qui pourront abriter la biodiversité associée aux forêts et ainsi équilibrer l’écosystème pour, par exemple, limiter les attaques de parasites grâce à la présence de leurs prédateurs.
  • Afin de faciliter l’adaptation des paysages forestiers belges au changement climatique, il faut dès aujourd’hui investir dans l’interconnectivité des forêts pour faciliter la migration des espèces.

Toutes ces mesures sont nécessaires pour garantir la survie des forêts multifonctionnelles remplissant au mieux leur rôle écologique, économique et culturel dans les paysages naturels belges. Parer nos forêts aux attaques d’insectes, à des sécheresses prolongées et à d’autres conséquences du changement climatique est un enjeu majeur pour enrayer la perte de biodiversité en Belgique et réussir à atteindre nos engagements.

 

Lire aussi : 

 

 

Articles scientifiques consultés:

  • Michel Terlinden, « Changement climatique, quel impact sur la forêt ? » Revue Silva Belgica, 118-2/2011.
  • De Frenne et al., « Klimaatverandering en Belgische bossen», Natuur.focus September 2014, Jaargang 13, Nummer 3.